2024
Atelier d'Éducation Artistique et Culturel - Penser l’unique, représenter le multiple.
Cela fait une quinzaine d’année que nous sommes traversé.es par des pratiques pédagogiques dites « nouvelles » ou alternatives. Élèves au Lycée Expérimental de Saint-Nazaire, puis animateurices et directeurices dans un centre d’accueil basé sur la pédagogie de la liberté, nous avons pu vivre et mettre en place concrètement ce genre de pédagogies. En 2015, lorsque nous avons créé la Cie la Migration, il nous a semblé évident de construire un cadre pédagogique à nos interventions d’action culturelle. En 2018, nous avons créé Cinétique.s, un premier cadre basé sur quatre axes de travail : l’éveil, la pratique, l’idée et la disponibilité. Nous avons fait un grand nombre d’ateliers avec cette ligne directrice. Nous sommes ravi·e·s d’avoir pu éprouver et approuver ce dispositif.
En 2024, parce que notre démarche artistique évolue, nous avons souhaité mettre à jour nos directions pédagogiques. En effet, nous avons remarqué qu’au sein de nos œuvres nous fonctionnons par cycles. Ces cycles viennent chercher leurs fondements au sein de questionnement lié à notre société. Nos réflexions pédagogiques sont évidemment liées à nos pratiques artistiques. Ils s’alimentent mutuellement !
Entre 2018 et 2024, nos sociétés ont connues des chamboulements : la crise sanitaire lié au COVID, les crises économiques, l’arrivée de l’intelligence artificielle, les chocs climatiques, la polarisation politique et la visibilité des violences sexistes et sexuelles sont des éléments majeurs qui participent pleinement aux mouvements de nos sociétés humaines.
Modestement, notre souhait avec ce nouveau cadre d’intervention est de prendre en considération un maximum de changement que nous posent les événements cités plus haut et de créer une posture pédagogique reliée. Il ne s’agira pas de changer le monde par nos interventions pédagogiques. Simplement de montrer qu’une autre voix existe, qu’une autre posture que celle du patriarcat est possible, qu’imaginer une synergie écologique est envisageable pour déployer une multitude d’imaginaires.
Nous axons notre nouvelle approche pédagogique autour de quatre grands thèmes : accueillir, apaiser, réconcilier et s’engager.
Accueillir
Bien souvent, tout ce qui se déroule autour de nous est trop rapide. Dans cette ligne, l’idée est de travailler une posture d’attention et non de concentration. La posture de l’attention est orientée vers une forme d’ouverture au déroulement autour de nous et aussi ce qui se passe en nous. C’est l’essence même de l’acteur, accueillir ce qui advient sans porter de jugement.
Apaiser
Nous avons tendance à mettre un jugement sur le jugement. La seconde ligne consiste donc à prendre en considération ce qui « est ». De ne pas nous faire submerger par nos préjugés. C’est un travail d’appréhension de nos peurs et de nos pensées chimériques.
Réconcilier
Nous proposons un décalage de pensée entre tolérance et altérité. Il nous semble essentiel avec les défis d’aujourd’hui de construire de nouveaux récits de la tolérance et de l’altérité. La tolérance provoque un système hiérarchique et l’altérité un système horizontal. Dans cette troisième ligne, nous souhaitons travailler une approche plurielle. Et explorer l’éventail des possibles entre le vertical et l’horizontal.
S’engager
Il nous paraît primordial de travailler les engagements : de la pensée, de la parole et du corps.
Nous perdons de vue les possibilités d’action qui s’offre à nous. L’arrivée de l’intelligence artificielle est un bon exemple, ainsi que l’attractivité des réseaux sociaux. Ces deux outils nous placent dans une posture passive. Nos corps et nos esprits se mettent au repos. Dans ce dernier thème, l’idée est de créer un cadre sécurisant permettant à la pensée, à la parole et au corps de se déployer et de s’exprimer.
Les temps d’ateliers
Nous commençons par une conférence animée, faites d’extraits vidéos d’œuvres principalement circassiennes. Cela permet aux participant·es de placer la démarche de la compagnie dans un paysage culturel actuel et de se projeter dans les ateliers à venir. C’est un premier temps d’échange et de rencontre ou le groupe et nous, nous nous synchronisons.
Ensuite, concrètement, nous avons compilé et inventé un grand nombre d’exercices chorégraphiques, théâtraux, circassiens pour répondre aux grands thèmes. Ce sont des exercices d’écoute et de mouvement, s’effectuant seul, à deux, en mini groupe et/ou en grand groupe. Ces exercices alternent l’observation et l’action. Ils permettent également d’explorer l’ensemble de notre corps : notre souplesse et notre force, tout comme l’aiguille d’une horloge qui explore l’ensemble des minutes et des secondes lorsqu’elle fait le tour du cadran.
Nous passerons beaucoup de temps à échanger à l’oral afin de réguler les ateliers, d’être au plus juste sur les besoins. Cela nous permettra d’explorer l’ensemble des thèmes. Épisodiquement, nous passerons par l’écriture, qui est une forme d’expression différente de la parole et qui laisse aussi une trace physique.
L’objectif est d’aller ensemble sur une construction commune. Une forme de scène, de performance ou chaque personne à sa place et sa singularité.